Depuis quelques mois je rédige un témoignage sur la fin programmée de mon métier: l'enseignement spécialisé. Une sorte d'oraison funèbre à la mémoire d'un travail que j'exerce depuis trente six ans et qui va disparaître au détriment d'enfants en souffrance à l'école...
EXTRAITS:
à Eric, Youssef, Stella, Karine, Mathis, Inès et les autres...
... j’ai éprouvé l’envie d’évoquer, pour leur rendre hommage, les histoires de quelques enfants que j’ai croisés sur mon chemin. Comme tant d’autres, leur sourires, leurs chagrins, leurs colères, leurs peurs, bref toutes leurs émotions, mais aussi leurs visages et souvent leurs prénoms, flottent dans mes souvenirs. Je voudrais que tous sachent, en souhaitant qu’ils l’aient ressenti au cours de nos rencontres, qu’en définitive c’est de fraternité dont il s’agissait...
...Il y a tant à faire !
Libérer les énergies affectives et intellectuelles, réduire les angoisses, redonner confiance en soi, aider à contrôler ses émotions et prendre conscience des dysfonctionnements qui entravent l’accès aux apprentissages…
Ce métier, c’est s’occuper de l’enfant en préambule afin qu’il trouve assez de réserves en lui pour se lancer dans la grande aventure de l’école.
C’est aussi accepter de se poser sans cesse des questions auxquelles aucun programme ne donne de réponse.
C’est parier sur chaque enfant inlassablement, être en attente, dans l’exigence, lui montrer qu’on croit en lui et qu’on le respecte malgré ses difficultés.
C’est rechercher, non pas des pratiques pédagogiques élaborées, mais souvent des jeux simples auxquels ils auront accès rapidement et qui les sortiront de la spirale déstructurante de l’échec.
Tous les matins, le défi que je me lance c’est que chaque enfant quitte mon bureau, en fin de séance, libéré, même de quelques grammes, du poids qui l’écrase.
Ainsi, il repart vers sa classe avec une meilleure chance d’occuper tant bien que mal sa place d’élève...
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